Les chroniques de Han-Maison
Chapitre 13
Jour 2.
J’ouvre l’œil vers 8h. Le son des burpees de Charlie m’a réveillé. Je relaxe dans mon lit le temps qu’elle finisse ses exercices. Une fois ses habits sports enlevés, on se prépare à descendre. Je ressens un peu d’appréhension. En fait, je me demande comment on va faire pour le déjeuner. Je n’ai pas particulièrement le goût de rencontrer les voix de l’autre soir. Au fond de moi, j’espère que la maison est déjà vide et qu’une note nous attend sur le comptoir pour nous indiquer quoi manger. Ce n’est pas du tout ce qui se produit. Lorsqu’on arrive au premier étage, les quatre nous attendent. Trois d’entre eux (dont Selma) semblent avoir à peu près notre âge. La dame assise sur le fauteuil, elle, vient plutôt des mêmes années que Pit. L’accueil est franchement froid. Au début, le silence envahit la pièce. Il est lourd et nous écrase. Charlie et moi sentons des regards qui nous fixent. Un malaise grandit entre nous. Pendant plusieurs secondes, je me contente de regarder mes pieds.
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Huhummm.
La dame se racle la gorge. Elle finit par parler :
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Je me nomme Ida. Comment vous appelez-vous ?
Charlie répond avec toute la politesse dont elle est capable.
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Bonjour à vous. Je m’appelle Charlie, et voici Émile.
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Enchantée, Charlie et Émile. Je ne vous cacherais pas que votre arrivée a fait l’objet de plusieurs discussions. Heureusement pour vous, Selma, juste ici, tenait beaucoup à ce que vous restiez près de nous. Je suis d’accord avec sa façon de penser. Mais maintenant, vous allez devoir ouvrir très grand vos oreilles. Il y a deux choses que vous devez retenir si vous voulez rester ici. Primeiro, tout le monde doit contribuer à sa façon. Charlie, nous allons avoir besoin de toi faire le lavage et entretenir le gazon. Notre végétation est rare et précieuse. Émile, toi, tu iras tirer les oiseaux avec Jaime.
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Tirer des oiseaux avec Jaime ?
Je n’ai aucune idée de ce que cette phrase veut dire. Et pourquoi est-ce que je devrais tirer des oiseaux ?
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Oui mon grand. De nos jours, les poules ont des dents. Et, s’il y a bien une chose que les oiseaux aiment manger, ce sont les humains. Les ondes radioactives ont eu un bien étrange effet sur eux. Maintenant, laisse-moi poursuivre. Segunda, personne ne doit savoir que vous êtes ici. Il existe un homme. L’impio, dit-elle d’une voix quasiment fantomatique. Il ne possède pas de grande légitimité, mais il s’est approprié le pouvoir à Lisbonne en semant la peur. Il détient, dirait-on, une machine qui permet d’enfermer les radiations nucléaires. Les ondes mortelles seraient relâchées sur les gens qui ne respectent pas les règles qu’il a lui-même créées. Ses victimes mourraient lentement, empoisonnées par le nucléaire. Malheureusement pour vous et pour nous, pas d’intrus, ça fait partie de ses règles.
Dans ma tête, je pense au fait qu’on est arrivés en avion en plein cœur de la ville. On aurait pu faire plus subtil comme arrivée d’intrus. Je garde cependant mes pensées pour moi, de peur qu’Ida nous chasse de la maison. Elle termine son discours sur cette note théâtrale. Comme si ce moment marquait une permission spéciale, les autres résidents de la maison se lèvent pour venir nous voir.