Les chroniques de Han-Maison
Chapitre 8
Ding dong.
On sonne à la porte de la maison et je suis le premier devant. Pourquoi ? Mon charme peut-être. La porte s’entrouvre une main en sort. Je n’ai le temps d’apercevoir qu’une main basanée et quelques bagues. Une canette avec de grosses lettres formant AEROFIX me pointe. Un jet aérosol en sort et m’asperge de la tête aux pieds. La moitié gauche de mon visage montre clairement que je suis dégoûté. Une fine poudre blanche recouvre mon corps et mes vêtements. J’en ai particulièrement plein les cheveux. J’attends notre hôte de pied ferme. Pas si ferme que ça en fait. Lorsque la porte s’ouvre complètement, une fille apparaît. Elle a de longs cheveux blonds avec de légers reflets bruns. On dirait que l’été s’est incarné en une personne. Et son visage est magnifique. Elle nous accueille d’un sourire craquant avec ses broches. Je me retourne vers ma famille. Peter et Charlie sont aussi soufflés que moi.
-
… nucléaire ?
Oups elle a parlé.
-
Tu as dit quoi ? demande Charlie.
-
J’ai dit : Vous ne vous êtes pas désinfectés du nucléaire bande de fous!
À ces mots, elle sort dehors et arrose de AEROFIX ma famille. L’ampleur de la situation me rattrape et mon sang ne fait qu’un tour.
-
La ville est contaminée par des ondes radioactives, c’est ça ? dis-je d’une petite voix chevrotante pour bien commencer notre conversation.
-
Attendez, vous n’êtes pas au courant ? demande-t-elle d’un air faussement surpris. La Terre a arrêté de tourner.
-
Oui…
Je ne comprends pas trop où elle veut en venir. Mais Nancy devient excitée. Elle lève la main en faisant des petits « oh » « oh » comme si elle voulait avoir la parole en classe. Elle finit par se lancer.
– Vous êtes une des régions qui a souffert de la diminution du centre gravitationnel de la Terre. L’atmosphère au-dessus de la ville est en train de s’effriter et les ondes plus fortes du Soleil, comme les ondes nucléaires, peuvent maintenant passer.
La fille blonde pointe Nancy.
– Et un point pour la dame qui est très certainement une professeure. La ville est affectée oui, mais pas ici. Alors c’est très important que vous vous désinfectiez avant d’entrer dans la maison. J’en conclue que vous ne venez pas d’ici. Sinon, vous seriez assurément au courant de ce qui se passe. Qu’est-ce que vous amène ?
Elle dit ça en s’accotant sur le cadre de porte, comme pour nous empêcher de passer. Notre explication va devoir être convaincante. Je prends une grande inspiration avant de me lancer.
-
Il y a eu un raz de marée sur l’île où on habitait. Notre maison est complètement détruite et on ne peut pas juste déménager n’importe où. Peter a besoin d’un respirateur le soir et d’un banc de douche. Mamie Martine a besoin d’un lit avec des rampes de sécurité et d’une toilette adaptée à ses vertiges. Charlie a grandement besoin d’une routine qui a tendance à manquer de nos jours. Et, moi, j’ai besoin d’appareils de physiothérapie pour ne pas faire de régression.
-
D’accord, et la professeure elle ?
-
On a besoin d’elle pour nous assister dans tout ça. Elle était bénévole dans notre maison avant, rétorquais-je.
Une fois mon explication terminée, le visage de la fille se referme. Elle fronce les sourcils et semble perdue à l’intérieur de sa tête. Cela ne dure qu’un instant. Son fameux sourire éclaire à nouveau son visage et elle nous ouvre le passage.
-
Bon allez, soyons fous, dit-elle en riant. Venez, je vais vous installer un peu.